Mystery of the Night

« À l’époque de la colonisation et de l’oppression, une sombre histoire est née. Surgies de la misère, la rage et l’hypocrisie, les ténèbres se nourrissent de la lumière. Dans un petit village, une forêt enchantée inspire la peur, car des esprits y vivent. Ils protègent la forêt contre les maléfiques rôdeurs. Beaucoup n’en ressortent jamais. » C’est sur cette note inquiétante que commence ce récit se déroulant aux Philippines sous le règne de l’Espagne dans les années 1900 : une époque de tyrannie, où le clergé et l’aristocratie espagnols faisaient beaucoup d’efforts pour dissimuler leurs nombreux méfaits et crimes innommables. Ayant été violée et bannie dans les bois lors d’une nuit de pleine lune, une femme voit son nouveau-né être enlevé par les ombres bestiales tapies dans le feuillage. Élevé par les mystérieuses goules et les mystérieux démons de la forêt — des sangliers, des chats sauvages et un sage aux yeux multiples — l’enfant grandit. Il découvre l’amour, puis le chagrin, et mène l’histoire à sa conclusion, se transformant en quelque chose de plus grand que nature, une créature mythique... une femme bafouée.

Adolfo Alix Jr. (DARK IS THE NIGHT, MANILA, PORNO), l’un des cinéastes indépendants les plus prolifiques et polyvalents des Philippines — dont les films multigenres ont été présentés dans pratiquement chaque festival de catégorie A, de Cannes au TIFF en passant par Rotterdam et Locarno — se tourne joyeusement vers l’horreur avec MYSTERY OF THE NIGHT, une étrange et puissante adaptation d’une pièce de de Rody Vera, Ang Unang Aswang (qui se traduit de façon évocatrice par « Le premier Aswang »). Alix Jr. fait un excellent usage de cette figure folklorique pour adresser les horreurs multigénérationnelles du régime colonial espagnol. Se déroulant comme un conte de fées classique, débordant de mystère et de leçons à apprendre, réinventé pour les spectateurs contemporains avec une touche d’érotisme et de bizarrerie, le film d’Alix Jr. marie l’artificialité de la pièce de théâtre avec les sensations fortes sanglantes et tangibles du cinéma d’horreur old-school du Sud-est asiatique. Le résultat est une esthétique unique et insolite qui crée progressivement un effet hypnotique, enfonçant ses griffes dans votre peau et vous tirant vers le monde infernal de son récit... Soyez averti! – Traduction : Kevin Laforest